Comment c’est, être journaliste radio ? Interview de Morgan Barthélémy de NRJ Paris

Mar 02, 2015

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Morgan, je l’ai rencontré il y a quelques années lorsqu’il bossait encore sur l’antenne de NRJ Grenoble. Je m’étais toujours dit qu’un jour, je lui demanderais de me raconter les coulisses de son métier. Et puis, vous savez ce que c’est : le temps passe à vitesse grand V et plein de projets restent dans les cartons. Mais le temps n’aura pas ma peau ! J’ai décidé de reprendre les rênes et de recontacter Morgan pour une interview. D’ailleurs Morgan, je sais que tu me lis, alors encore un immense merci d’avoir été aussi réactif, et bien sûr pour la qualité de tes réponses !

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♦ Morgan, tu es journaliste sur NRJ, peux-tu nous en dire un peu plus sur toi et ton parcours ?

Je me suis lancé il y a maintenant 5 ans et je n’ai quasiment travaillé que pour NRJ car j’ai eu la chance d’être embauché directement à la fin de mes études à l’ISCPA Paris.

J’ai commencé dans une petite antenne locale, à Cherbourg, avant d’être muté un an plus tard à Grenoble, ma ville d’origine. Finalement en août 2014, j’ai eu une nouvelle promotion et je travaille depuis sur l’antenne nationale à Paris.

A côté de la radio, j’ai aussi été pigiste pour un site spécialisé dans la santé et je suis actuellement en discussion pour devenir enseignant en journalisme.

♦ Avant, tu étais journaliste sur l’antenne grenobloise. Qu’est-ce que ça change de travailler chez NRJ à Paris ?

Beaucoup de choses ! Sur le papier, je dois accomplir les mêmes missions mais tout est radicalement différent.

Le journaliste « natio » est celui qui interview les stars que les auditeurs découvrent à l’antenne. Et c’est tout un exercice entre les rendez-vous à caler, les heures d’attentes le jour J, la pression des attachés de presse et/ou managers, les interviews qui durent 3 minutes au lieu des 15 convenues en amont.

La patience est la qualité principale d’un journaliste et ça se vérifie encore plus dans ce contexte.

Forcément, l’échange humain que l’on peut avoir avec les personnes interviewées n’est plus aussi riche. Mais on fait aussi de belles rencontres avec certains artistes « accessibles » malgré le succès.

♦ Concrètement, quelles sont tes missions? Et quelles sont les spécificités d’un journaliste radio ?

Ma semaine s’étale du mercredi au dimanche avec 3 jours de reportage et 2 jours de matinales le week-end. Je suis à la fois reporter et présentateur.

Le « reportage » inclut les interviews mais aussi la rédaction de chroniques diffusées par mes collègues dans les flashs de la semaine.

Les matinales consistent à rédiger et présenter les flashs infos (10 passages antennes entre 6 et 9h). Il faut aussi envoyer 2 ou 3 infos (inter)nationales essentielles aux antennes locales.

Le journaliste radio n’a pas d’horaires mais uniquement des délais comme la plupart des journalistes.

Nous travaillons bien souvent dans l’urgence car c’est un média de l’immédiat. Une info tombe, il faut la communiquer aussitôt.

Contrairement à la télé et à la presse écrite, nos reportages n’ont que le son pour faire passer une info, une image, une couleur… C’est le défi qui m’a poussé à faire ce métier : communiquer et plonger l’auditeur dans un lieu uniquement avec le son, le bruit ambiant, l’émotion dans une voix,…

♦ Est-ce que tu es souvent sollicité par des attachés de presse ? Par quel biais te contactent-ils ? (Facebook, Twitter, mail, téléphone…) et quel est le plus efficace ?

Les attachés de presse que je côtoie restent assez traditionnels dans leur approche, ça se passe essentiellement par mail ou par téléphone.

Selon moi, le plus efficace reste le mail car on est souvent occupé par autre chose quand on nous appelle par téléphone.

Facebook est moins employé mais peut justement attirer l’attention car le flux d’information y est moins important.

Personnellement, je ne me sers pas de Twitter comme un moyen de communication mais plutôt comme une veille média. Je regarde uniquement ce qui est twitté et pas forcément mes nouveaux followers ou mes messages. C’est bien pour contacter certains journalistes mais la portée est assez inégale.

♦ Est-ce qu’il y a des moments te prédilection pour te parler d’un sujet ?

J’ai failli répondre à cette question dans la précédente !

Bien choisir son moment, c’est primordial.Je reçois entre 200 et 300 mails par jour et après nettoyage (ce n’est plus un tri à ce niveau-là), je dois en garder même pas 5%.

Pour bien faire, c’est comme bison futé, il faut éviter les heures de pointe. Je conseillerais d’éviter le lundi matin jusqu’à 10h. Avant, le nettoyage n’est pas fait et les conférences de rédac sont calées vers 9h30 – 10h.

Le vendredi après-midi/soir et le week end sont donc à proscrire.

L’idéal pour envoyer un message c’est entre 10h et 12h30 et entre 14h30 et 17h.

Par téléphone, il faut se procurer (si possible) le portable du journaliste et envoyer un texto ou laisser un message.

♦ Qu’est ce qui pour toi, fait qu’un(e) attaché(e) de presse est efficace et va te faire gagner du temps ?

Evidemment, il faut appliquer tout ce qui vient d’être évoqué.

Quand un attaché de presse veut se constituer un réseau, il ne faut pas hésiter à proposer un café/déjeuner un peu informel avec le journaliste. Déjà parce qu’on aime beaucoup le café, mais c’est surtout l’occasion de faire le point sur les besoins de l’un et de l’autre.

L’attaché de presse doit impérativement connaitre la cible et la ligne éditoriale du média avec lequel il veut travailler. Cela permet de proposer des sujets pertinents et de mieux cibler vos appels et envois de mails.

Un bon communiqué de presse doit être, à mon sens, construit un peu comme un article de presse web : Titre, chapeau, paragraphes courts. Pensez aussi à mettre vos phrases clés en gras.

Si vous connaissez bien le journaliste, gardez le CP pour la pièce jointe et mettez un petit message personnel dans le corps du mail du type : «  Salut machin, je t’envoie ce communiqué car nous organisons tel évènement avec tel invité et je pense que ça pourrait intéresser tes auditeurs/lecteurs. Tout le détail est en PJ. N’hésite pas à m’appeler si besoin ».

♦ Est-ce que c’est important pour toi d’avoir une relation durable avec les attachés de presse, ou de les rencontrer de visu ?

Oui et c’est vraiment plaisant...d’où l’idée du café/déjeuner pour une première rencontre.

Mais attention, il ne faut pas non plus que cette relation tombe dans le copinage. C’est peut-être avantageux pour le communicant mais c’est extrêmement dangereux pour le média.

Une relation durable et saine crée un lien de confiance. Le journaliste peut compter sur vous quand vous connaissez ses impératifs et que vous pouvez l’aiguiller vers l’interlocuteur le plus intéressant pour parler de votre sujet.

Dans les moments les plus tendus, ça peut aussi être très bénéfique. Vous ne vous vexerez pas s’il ne répond pas à votre mail ou s’il ne traite pas votre sujet. Lui, comprendra que tel dirigeant ou tel élu n’est pas disponible. En communication de crise, cela vous facilitera aussi les choses.

♦ Utile ou pas qu’un attaché de presse te relance plusieurs fois s’il n’a pas obtenu de réponses de ta part ?

N’harcelez pas vos journalistes ! Un mail + une relance téléphonique avec message vocal suffisent. Si vous n’avez pas de réponse c’est que le sujet n’est pas intéressant pour lui, ce sera pour une prochaine fois.

Encore une fois, si vous connaissez bien le média et choisissez bien les sujets que vous proposez, le taux de réponse va exploser.

Trop d’attachés de presse nous reprochent encore de ne pas répondre à leurs mails. Mais nous n’avons tout simplement pas le temps. Chacune de nos journées sont différentes et vite remplies avec leurs impératifs, de nouveaux sujets à traiter qui tombent.

Si votre sujet est intéressant pour le journaliste, c’est lui qui va vous recontacter.

Pour résumer, 98% des non-réponses sont des réponses négatives et il est extrêmement rare qu’un sujet soit traité grâce au forcing. Au mieux vous aurez un article pas terrible, au pire vous vous ferez blacklister.

Idem pour les intervenants. N’essayez pas d’imposer quelqu’un pour une interview.

Par exemple, mes auditeurs sont plutôt jeunes. Sur une opération sécurité routière (type sensibilisation à l’alcool au volant), je préfère avoir des jeunes qui m’expliquent ce qu’ils ont appris plutôt qu’un capitaine à l’accent inaudible qui va représenter l’institution. Le message passera nettement mieux si ce sont des jeunes qui parlent aux jeunes.

♦ Un dernier mot ?

J’aime vraiment le café et les déjeuners !

Plus sérieusement, il ne faut pas hésiter à s’inspirer des méthodes de certaines institutions pour bien démarrer ou progresser dans la com presse. Inscrivez-vous si possible à leurs mailings.

Sur Grenoble, je pense notamment à Grenoble Ecole de Management qui applique 99.9% des astuces évoquées. La Mairie fait aussi d’assez bons communiqués.

Article publié par Mary Grammont le 2 mars 2015

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